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SOUTH BY SOUTHWEST 09
Austin, Texas, mars 2009

Texte et photo: Raphaël Gendron-Martin
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Est-ce fou de conduire plus de 36 heures aller-retour pour ne passer que 48 heures à un endroit? Pas quand c'est pour assister au meilleur festival de la planète, si ce n'est de l'univers!

C'est la semaine dernière que se déroulait le populaire festival de musique (mais aussi de film et multimédia) South By Southwest (SXSW de son petit nom). Je n'étais jamais allé à cet événement et quand deux amis m'ont parlé de la possibilité d'y assister, j'ai sauté sur l'occasion. Le hic, c'est qu'il fallait y aller en voiture. Pas grave, à trois, on a pu se relayer et c'est ainsi qu'on s'est tapé le trajet Chicago-Austin d'un seul trait, jeudi soir dernier.

Arrivés sur place vendredi après-midi, nous étions brûlés mais évidemment excités à l'idée de voir quelques-uns des 1900 spectacles présentés durant le festival. Oui, vous avez bien lu! La ville d'Austin n'étant pas si grande (environ un million d'habitants, donc plus grosse que Québec, mais plus petite que Montréal), pratiquement tous les endroits publics - bars, restaurants, églises, cours arrières de maison, name it - étaient mis à la disposition du festival.

En arrivant au coeur de l'action, soit l'intersection Red River et 6th Street, on comprend assez rapidement à quel point SXSW est un festival unique en son genre. Du monde, il y en a partout. On m'a d'ailleurs dit qu'il y avait environ 2 millions de personnes qui se déplaçaient pour cet événement annuel.

Bien entendu, avec autant de spectacles présentés partout en ville, il est assez difficile de s'y retrouver. En fait, il y a deux façons d'attaquer un festival de la sorte. La première est de bien se préparer et de se planifier un horaire précis avec les concerts à voir. La seconde est d'y aller au hasard, au gré du vent, et souhaiter faire de jolies découvertes. Nous avons choisi la deuxième option, principalement parce que nous n'avions pas d'accréditations média, ce qui nous limitait un peu dans le choix des concerts. Heureusement, de très nombreuses prestations étaient gratuites pour tous.

Premier arrêt : bar Mohawk. À notre arrivée, The Delta Spirit se produit sur la scène extérieure. Mais nous sommes un peu trop énervés par tout le brouhaha pour vraiment porter attention au spectacle et nous décidons plutôt de nous promener aux alentours. En se rendant sur le toit du bâtiment, on remarque juste à côté un autre bar, Club de ville, qui propose lui aussi un spectacle à ciel ouvert. Et c'est comme ça partout dans la ville, littéralement. Pas besoin de vous dire qu'en l'espace de quelques minutes, je réalisais que j'étais vraiment dans mon élément ici, heureux comme un pape de voir autant de spectacles dans les moindres recoins d'Austin.

On remarque également à quel point tout le milieu musical américain, et même international, semble s'être donné rendez-vous dans cette ville texane. En plus des quelques 1500 et autres bands, des centaines et des centaines d'étiquettes de disque sont sur place, dans l'espoir de dénicher des groupes pour leur faire signer un contrat, et vice versa. Il y a aussi une multitude de médias spécialisés en musique. Dans la foulée des gens croisés ce weekend-là, on y aura aperçu le fondateur de Pitchfork, ainsi qu'un critique du Chicago Sun-Times.

Pour prolonger l'après-midi, on décide de marcher une dizaine de minutes pour se rendre à l'espace de MyOpenBar.com. À cet endroit se retrouvent quatre scènes placées à quatre endroits différents. Et à chaque 20 minutes, c'est un groupe différent qui monte sur l'une des scènes. À notre arrivée, c'est la formation Pre, du Royaume-Uni, qui se produit. C'est particulier. La chanteuse se "garroche" partout! Au moins, ils ont de l'énergie. Par la suite, c'est Dark Meat, un groupe d'Athens en Georgie, qui monte sur une autre scène. Dans leur cas, c'est la totale. Une dizaine de musiciens sur les planches, avec des cuivres, des cordes et des percussions. Il y a même des guirlandes et des confettis partout!

La journée se poursuit et la fatigue se fait de plus en plus sentir de notre côté. Alors qu'on est sur le point de rebrousser chemin et de déclarer forfait, aux alentours de minuit, on entend des bruits de batterie au loin. On se rend compte qu'il y a un spectacle dans une cour arrière, à l'abri des regards indiscrets. Sur place, des centaines de personnes encerclent un petit gazebo, qui doit faire 20 pieds par 20 pieds tout au plus. C'est là que se produit le groupe Health, de Los Angeles. La formation fait ce qu'on pourrait appeler du noise rock, car c'est bruyant en pas pour rire! J'ai rarement vu des musiciens aussi déchaînés. En ajoutant à cela l'endroit inhabituel du spectacle, avec la proximité des spectateurs, ça donnait un concert unique. De loin mon moment favori du festival et un groupe que je vais suivre à compter de maintenant.

Pour notre deuxième (et déjà dernière) journée de SXSW, on choisit de se rendre au Waterloo Park, où plusieurs groupes se produisent gratuitement toute la journée. Après quelques minutes toutefois, on décide d'aller se promener ailleurs, car la liste des formations ne nous enchante finalement pas trop. Et c'est ça, la beauté de SXSW. Si tu n'aimes pas ce que tu entends, tu n'as qu'à aller ailleurs, où des centaines d'autres groupes se produisent en même temps.

Mais avant de quitter, je décide d'aller faire un tour un peu plus loin dans le parc, question d'être sûr de ne rien manquer. À l'autre extrémité, je remarque une seconde scène. Mes oreilles perçoivent alors une mélodie connue, A.M. 180, de Grandaddy. Je trouve ça bizarre que quelqu'un joue une reprise d'un groupe qui s'est séparé en 2006. Je jette un coup d'oeil à la programmation pour apercevoir le nom de Jason Lyttle, l'ancien chanteur de Grandaddy! Lyttle sortira un album en mai, d'où la raison de sa présence à SXSW. Malheureusement, c'était le rappel de son spectacle, et je n'ai pu entendre qu'une autre pièce avant qu'il ne tire sa révérence. Mais c'était toutefois une jolie surprise.

On quitte le parc pour aller voir le show de Camera Obscura. Mais en sachant que le groupe ne monte sur la scène qu'à 17 h, ça nous laisse le temps de voir Sebastien Grainger & The Mountains juste à côté, au Club de ville. L'ancien chanteur-batteur de Death From Above 1979 et ses comparses sont vraiment en feu et leur prestation s'avère mon second moment fort du weekend. C'est bruyant, percutant, même explosif. Encore là, la proximité du groupe avec la foule est géniale, car le chanteur n'hésite pas à descendre parmi les spectateurs pour interpréter quelques morceaux. C'est durant ce spectacle-là que je me suis rendu compte à quel point SXSW devait être un événement trippant pour tous les artistes. Durant leur séjour à Austin, les musiciens moins connus donnent environ quatre ou cinq spectacles d'une trentaine de minutes, dans des salles différentes. Ils se font ainsi voir par des publics diversifiés et leurs courtes prestations leur permet ensuite d'avoir du temps libre pour, eux-mêmes, voir des concerts. Bref, c'est le party pour tout le monde!

Retour au Mohawk pour voir Camera Obscura. Le groupe de Glasgow, en Écosse, profite d'un certain buzz et la file d'attente pour entrer dans le bar est relativement longue. C'est aussi un autre aspect qui décrit SXSW : il faut s'armer de patience assez souvent lorsqu'on souhaite assister à un spectacle, car des files, il y en a partout, et ce, même s'il y a près de 2000 spectacles durant le festival. Camera Obscura, qui sortira un nouvel album en avril, offre une solide mais vraiment trop courte prestation. Tant pis, on retournera le voir lors de sa tournée nord-américaine.

La journée se continue dans un bar dont j'oublie le nom. La mention "Free show" sur la porte attire notre attention et on pénètre dans l'établissement, vraiment vers l'inconnu. C'est le groupe Scissors For Lefty, de San Francisco, qui y joue. Son rock est sans prétention, accrocheur par moments, mais pas trop original.

On prend ensuite un taxi pour se rendre dans un autre parc extérieur. C'est là que doit se produire Explosions In the Sky, une formation originaire d'Austin et de plus en plus populaire sur la scène nord-américaine. Le parc est rempli de milliers de personnes. On se rend compte que la plupart sont venus voir Erykah Badu qui joue tout juste avant avec son nouveau groupe, The Cannabinoids. Explosions doit monter sur la scène à 20 h, mais étrangement, Erykah chante toujours à cette heure. On apprendra le lendemain que la chanteuse avait dû retarder sa prestation en raison de problèmes personnels survenus à Dallas.

Les héros locaux prennent finalement d'assaut la scène vers 20 h 45. Ce qui aurait pu être la consécration pour eux s'avère plutôt un ennui mortel. Les longues envolées instrumentales, si frappantes sur disque, tombent presque toutes à plat. Blâmons le son, visiblement déficient lors du spectacle. Au bout du compte, les seules explosions qu'on aura eues sont les feux d'artifice qui illuminent le ciel à la toute fin du spectacle.

La fin de South By Southwest commence à se faire sentir pour nous et on se demande avec quel concert on bouclera le tout. On essaie de se retrouver dans l'immense horaire. MSTRKRFT joue à 1 h du matin, mais la file est interminable. On tente notre chance pour Silversun Pickups, mais le même problème survient. Que reste-t-il d'autre à la même heure? Marcy Playground! Eh oui, le groupe des années 90, connu pour son (seul?) hit Sex And Candy, joue sur une terrasse extérieure. Sur place, on apprend qu'il faut débourser 13 $ pour le spectacle, alors qu'on voit très bien la scène de la rue, gratuitement. Nous sommes restés dans la rue pour entendre les paroles très profondes : "I smell sex and candy here." Ça finissait bien ce weekend de fou à Austin.