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THE DEARS
Lakeshore Theatre (Chicago), mai 2009

Texte et photo: Raphaël Gendron-Martin
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Quelques jours à peine après s'être fait voler son autobus de tournée, le groupe montréalais The Dears était de passage à Chicago. On peut dire qu'il en faut bien plus pour que Murray Lightburn et Natalia Yanchak décident d'annuler des spectacles. Au cours des derniers mois, les deux musiciens (qui forment également un couple dans la vraie vie) ont vécu une véritable implosion au sein de leur formation, si bien que tous les autres membres ont décidé de quitter le navire. Cette crise aurait pu facilement sonner le glas du groupe indie rock, mais on serait presque porté à croire que Murray et Natalia en sont sortis encore plus forts.

Mercredi soir, accompagné de cinq autres nouveaux musiciens, Murray et Natalia amenaient leurs Dears dans la Ville des vents, sept mois après avoir lancé Missiles, le quatrième album studio de la formation. Bien honnêtement, le choix de la salle m'avait fait sourciller : le Lakeshore est une salle traditionnelle de théâtre où sont généralement présentés des spectacles d'humour. Les shows de musique, à proprement parler, y sont assez rares (cette semaine, Iron & Wine était également de passage à cet endroit). Qui plus est, la petite salle - un peu plus de 200 places - ne comprend que des sièges. Pour un groupe qui a l'habitude de "rocker la place", il était décevant de savoir qu'il faudrait apprécier la performance assis sur un siège. La dernière fois que les Dears s'étaient produits à Chicago, ils avaient foulé les planches du Metro, une salle facilement deux fois plus grande. Est-ce que leur popularité serait en chute libre aux États-Unis? À voir la foule d'hier, je répondrais facilement par l'affirmative.

Car le Lakeshore Theatre n'était rempli qu'au tiers hier soir. Je ne blague pas, j'y ai compté tout au plus 80 spectateurs. Vraiment décevant pour un groupe qui a reçu de très bonnes critiques de tous ses albums, et qui, dès la sortie de No Cities Left, en 2003, était considéré comme l'ensemble anglophone le plus prometteur de Montréal. Les Dears avaient tout le potentiel pour devenir aussi connus internationalement qu'Arcade Fire. Qu'est-il arrivé? Malgré la crise précédemment mentionnée, le groupe a toujours réussi à offrir des albums de qualité. Faut croire que percer le marché américain n'est pas évident pour tout le monde.

D'accord, quelques facteurs hier ont pu rebuter certaines personnes à se rendre au concert. En premier lieu, le spectacle débutait très tard (22 h), avec deux premières parties. Les Dears ne devaient donc pas fouler les planches avant minuit. Pour un soir de semaine, ce n'est pas attrayant. "Il pleuvait aujourd'hui, il y a la récession et c'était aussi la finale de Lost!", a énuméré lui-même Murray en fin de spectacle, remerciant les quelques braves fidèles qui étaient toujours au poste lors du rappel, à 1 h 40!

Heureusement, les Dears ont fait fi de la faible assistance pour offrir un excellent spectacle. Avant d'en parler, abordons les deux premières parties. D'abord, Eulogies a eu la tâche de réchauffer la maigre foule. Coiffé d'un chapeau, le chanteur Peter Walker avait des airs de David Martel ou de Francis Healy de Travis. La formation faisait la promotion de son opus Here Anonymous, paru en avril dernier. Le groupe donne dans le pop-rock sans prétention et quelques-unes de ses chansons sont fort accrocheuses. Comme première partie, le mandat fut réussi.

Peu de temps après est arrivé sur scène le groupe Great Northern. Avec une chanteuse en avant-plan, et un guitariste qui portait un poncho aux allures de Clint Eastwood dans ses vieux westerns, la formation offrait une ambiance spéciale d'entrée de jeu. Et probablement que GN possède déjà des fans, car quelques spectateurs se sont déplacés jusqu'à l'avant de la scène afin de se déhancher.

Quelques minutes passées minuit, c'était enfin au tour des Dears de se produire. Débutant le concert en marchant dans la foule, Murray s'est longuement attardé au parterre où il a offert un contact privilégié avec les spectateurs présents. Par la suite, il a rejoint ses autres musiciens sur la scène et le concert s'est déroulé rondement. Les Dears sont capables d'offrir des chansons très intenses et explosives, mais ils peuvent aussi devenir planants et émotifs. Le fait qu'il n'y avait pratiquement personne dans la salle a permis aux quelques fans de s'approcher de la scène pour boire les paroles du chanteur. Personnellement, j'avais avec moi mon appareil-photo et j'ai bien apprécié le fait que je pouvais me promener partout, à ma guise. Dans le cadre d'un spectacle à guichets fermés, je n'aurais jamais eu cette liberté. Mais malheureusement, regarder un concert au sein d'une salle vide procure inévitablement un malaise chez le spectateur. Même si les musiciens n'en font pas de cas et qu'ils livrent leur concert comme si de rien n'était, ce n'est pas pareil. J'espère que le groupe jouera devant davantage de gens dans les autres villes américaines. Ou qu'il choisira des salles plus petites.

Liste des pièces jouées par The Dears, dans l'ordre:
Saviour; Money Babies; Demons; There Goes My Outfit; You and I Are a Gang of Losers; Lost in the Plot; Berlin Heart; Disclaimer; Crisis 1 & 2; Dream Job; Whites Only Party; Hate Then Love; Meltdown in A Major; Lights Off
Rappel: We Can Have It