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RICHARD CHEESE
House Of Blues (Chicago), juillet 2009

Texte: Raphaël Gendron-Martin

Depuis que la musique existe, des chanteurs reprennent des morceaux connus d'autres artistes. Ces relectures (communément appelées "covers" ou "remakes") sont parfois faites avec goût, mais sont plus souvent qu'autrement ratées. Les puristes en viennent ainsi à déclarer que rien ne sera meilleur que la version originale.

Aux États-Unis, depuis déjà plusieurs années, sévit un crooner comique qui relit avec brio des pièces d'artistes tels Nirvana, The Offspring, System Of A Down, Radiohead, Beastie Boys et autres Nine Inch Nails. Avec ses musiciens du Lounge Against The Machine, Richard Cheese revisite avec humour ces plus grands classiques de la musique rock, métal et punk. Contrairement à plusieurs autres artistes qui se prennent au sérieux en reprenant des chansons connues (lire: les Lost Fingers), M. Cheese (de son vrai nom Mark Jonathan Davis) met l'humour à l'avant-plan. Il respecte presque en tout point les paroles des morceaux, mais en ajoutant ici et là des sacres bien placés ainsi que de nombreuses allusions sexuelles. On se retrouve donc avec des chansons rigolotes et bien souvent outrancières.

Dernièrement, on a annoncé que Richard Cheese effectuait une tournée d'adieu et qu'il passait par le House Of Blues de Chicago. Je me suis empressé de me procurer un billet, car je ne voulais pas manquer cet événement unique. Finalement, j'ai su que cette "tournée d'adieu" se voulait plutôt une dernière série de spectacles du crooner avec son Lounge Against The Machine. Ainsi, le chanteur continuera de se produire dans le futur, mais dans un contexte différent. Voilà pour la mise au point!

Le House Of Blues (capacité de 1300 places) affichait complet pour ce rare passage du chanteur de Las Vegas. En arrivant dans la salle, les haut-parleurs diffusaient des morceaux de Weezer, Beastie Boys, The Killers et Disturbed, tous des artistes repris par Richard Cheese. Déjà, on sentait l'engouement de la foule.

C'est sûr le coup de 21 h 15 que le Lounge Against The Machine s'est mis à jouer, alors que le rideau était toujours fermé. Un air de The Reason, du groupe "one-hit wonder" Hoobastank, a alors résonné. Puis le rideau s'est ouvert et Richard Cheese est apparu, vêtu d'un tuxedo noir, verre de martini à la main. "You let me violate you / You let me desecrate you / You let me penetrate you / You let me complicate you", s'est-il mis à chanter, nous faisant immédiatement reconnaître Closer de Nine Inch Nails. Ça commençait bien.

Malheureusement, ma bonne humeur s'est un peu estompée lorsque le chanteur a confié aux spectateurs qu'il souffrait d'un sérieux rhume et que sa voix était mal en point. Qui plus est, quelques secondes plus tard, il avertissait la foule d'un air un peu étrange qu'il était strictement interdit de filmer le spectacle et qu'il ne souhaitait pas être non plus dérangé pendant ses interprétations. Court malaise.

Heureusement, le crooner a reparti le show de plus belle et il a enchaîné avec de nombreux succès que les spectateurs connaissaient par coeur. "Merci Chicago. On a prévu jouer jusqu'à 22 h 45, mais si vous êtes gentils, on va peut-être se rendre jusqu'à... 22 h 48!"

Entre chaque chanson, l'artiste rigolait avec la foule. En fait, je me demande si j'ai déjà vu un spectacle avec autant d'interaction entre un chanteur et ses spectateurs. Au tout début du concert, Cheese a demandé à n'avoir que des filles au premier rang du parterre, question de pouvoir les cruiser sans retenue. Et il ne s'est pas gêné tout au long de sa prestation. Alors qu'il a remarqué une jolie demoiselle au balcon, le chanteur lui a demandé de nous montrer ses attributs féminins. La spectatrice a refusé sous prétexte qu'elle était venue au spectacle avec son père. Oups! Autre malaise, mais très drôle celui-ci!

Le show n'a pas manqué de décadence puisque deux autres spectatrices se sont chargées plus tard de montrer leur poitrine à l'assistance, tandis qu'une autre fan éméchée qui souhaitait "pogner le paquet" du chanteur a dû plutôt se rabattre sur un autre spectateur qui a servi de "doublure" à M. Cheese!

Visiblement très grippé, Richard Cheese a donné malgré tout une excellente performance, même si sa voix l'a lâché à l'occasion lors d'envolées lyriques plus complexes. Sur une table située derrière lui se trouvaient un verre de martini, un verre de vodka-canneberge ainsi qu'une tasse de café. Le chanteur a alterné entre les trois récipients tout au long du concert, affirmant être très "buzzé" par le mélange d'alcool et de médicaments. (On doute toutefois qu'il consommait vraiment de l'alcool durant sa prestation.)

Pendant le spectacle, qui a duré deux heures tapant, le chanteur a offert de nombreux cadeaux aux spectateurs. "Prenez-les, je ne veux pas être pris pour ramener ça chez moi." Les chanceux ont ainsi pu repartir avec des cd, des t-shirts portant la mention "I Love Dick", des g-strings et des autocollants.

"La prochaine chanson est de l'artiste Pink... Floyd", a-t-il lancé à un moment donné, faisant inévitablement rire la foule. Au parterre, on remarquait un gars de la sécurité qui surveillait les spectateurs pris en flagrant délit de filmer la prestation. Pourquoi être aussi pointu sur cet aspect? "Vous ne pouvez pas filmer parce que je n'ai pas les droits des chansons. Si vous mettez ça sur YouTube, je vais aller en prison. Et si ça arrive, qui va coucher avec la fille au premier rang?", a fait remarquer le chanteur.

En assistant à un spectacle de Richard Cheese, on est assuré de ne pas s'ennuyer une seule seconde. Lorsque le chanteur se rend en coulisses pour changer de tuxedo (il en portera quatre différents), il s'assure que ses trois musiciens divertissent la foule, jouant notamment Eye of the Tiger. Au bout d'une heure de spectacle, je me suis posé la question : "Est-ce que Richard Cheese a déjà repris une pièce de Michael Jackson?". J'ai eu ma réponse quelques minutes plus tard lorsqu'il a repris d'excellente façon Billie Jean. Un peu plus tard, il proposait un medley sur les Beastie Boys, prenant soin de le dédier à MCA, récemment atteint du cancer. Le chanteur n'a pas repris que des chansons de groupes, il a aussi proposé à la sauce crooner une relecture de la publicité des restos Subway ainsi que la chanson-thème de Bob L'Éponge (Spongebob Squarepants Theme), agrémentée de bulles propulsées dans la foule.

En fin de parcours, Richard Cheese s'est rendu sur le parterre et est même monté jusqu'au deuxième balcon pour interpréter une chanson. Il a conclu le tout par un Viva Chicago (au lieu de Viva Las Vegas), assurant aux spectateurs qu'il serait de retour en ville l'an prochain. Pour la tournée d'adieu, on repassera! C'est une bonne nouvelle puisque cela permettra peut-être au chanteur d'aller se produire à Montréal, qui sait?

Liste non-exhaustive des pièces jouées par Richard Cheese & Lounge Against The Machine (avec les interprètes originaux), dans le désordre:
The Reason (Hoobastank); Closer (Nine Inch Nails); Creep (Radiohead); Airbag (Radiohead); Chop Suey (System Of A Down); Somebody Told Me (The Killers); Baby Got Back (Sir Mix-A-Lot); Brass Monkey/So Watcha Want/Sabotage (Beastie Boys); Gin and Juice (Snoop Dogg); Buddy Holly (Weezer); Billie Jean (Michael Jackson); Just Dance (Lady Gaga); Sunday Bloody Sunday (U2); Me So Horny (2 Live Crew); Another Brick In the Wall part 2 (Pink Floyd); Imperial March (tirée de Star Wars); Don't Cha (The Pussycat Dolls); WKRP in Cincinnati (chanson-thème de la série télé); Spongebob Squarepants Theme; Five Dollar Footlong (publicité de Subway); Eye of the Tiger (Survivor); Viva Las Vegas (Elvis Presley)